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Mis à jour le
29 février 2024
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13 minutes

Quelle est la véritable étendue de cette écologie ? Comment incarner au mieux celle-ci dans ma vie de tous les jours ? Et comment, dans cette incarnation, ma sensibilité de chrétien peut-elle, doit-elle, s’exprimer ? Autant de questions qui sont un peu à l’origine de ce site de blog. Des tentatives, toutes plus maladroites les unes que les autres parcourent le chemin que j’ai parcouru pour obtenir, peut-être, un début de réponse. Vous me permettrez d’y faire référence tout au long de ce billet.

Un peu de contexte

Mais de quoi il parle ? Pour ceux qui n’ont évidemment pas le temps de parcourir mon « œuvre » (je préfèrerais le mot travail), ma démarche est d’essayer de comprendre les enjeux ainsi que les errements (jugement qui n’engage que moi) du combat écologique qui est devant nous. Intégrisme, méfiance, absence de projets, complotisme, autant de pistes ou de tendances malsaines, qui ne mènent nulle part. Ne souhaitant pas ne voir que le verre à moitié vide, j’ai également mentionné des initiatives qui vont dans la bonne direction. Ces pistes de réflexions, vous pouvez les découvrir en détail dans les différents articles de ce site.

Le défi

Sous une « couverture » environnementale, la problématique écologique à laquelle nous faisons face n’est qu’une façade qui couvre des soucis bien plus anciens et bien plus profonds. Le niveau des mers s’élève. La biodiversité s’affaiblit. Les évènements météo extrêmes se multiplient. Etc. Oui, certes, mais ce n’est que la moitié du problème.  Que l’état malgache ait été poussé à céder ses droits de pêches aux grands chalutiers n’est pas franchement un problème d’environnement. Que les « économies » d’eau que nous pouvons faire ici en Europe n’aille pas augmenter la pluviométrie, déjà très faible en temps normal, de certaines régions du monde est une réalité géographique. Que les importations de soja depuis l’Asie pour satisfaire un certain délire végan ne vont pas être compensés par les diminutions de viande est une évidence économique. On pourra augmenter un débit, diminuer une conso, réduire une décharge, utiliser une techno, nous n’aurons pas réglé tous les problèmes pour autant. Et ainsi de suite. Je vous propose d’ailleurs de consulter l’encyclique du pape François, « Laudato Si » à ce sujet. Il expose de manière très claire tous ces défis humains posés par notre environnement.

Le concept de partage équitable n’est pas, et n’a jamais été, dans les gênes de la nature. Son système d’autorégulation fonctionne différemment : sélection naturelle, chaine alimentaire pour ne citer que ces deux aspects. Même si cela est un peu plus complexe, c’est la loi du plus fort, au moins entre les espèces. De cette évolution, l’Humanité s’est elle-même disqualifiée. Non pas qu’elle ne participe plus à une certaine « sélection naturelle », mais les outils dont elle se sert s’adaptent beaucoup plus rapidement que les changements dus à cette sélection. Comme cette humanité est capable également du pire, cette loi du plus fort s’est transformée en loi du plus puissant. Il suffit de regarder d’un peu plus près les inégalités sociales. Ces inégalités, on en parle depuis plus de deux mille ans, mais on n’est toujours pas arrivé à les réduire. Aujourd’hui, pour certains, il va falloir apprendre à renoncer. Mais je suis convaincu que cela ne sera pas suffisant : il va falloir également apprendre à donner.

Les limites de la liberté

Même si l’éthologie a encore une belle marge de progression, certaines émotions sont clairement définies comme proprement humaines. La jalousie, l’amitié et la colère en sont des exemples parlants. Il en est de même pour la liberté. Dès l’instant où nous pouvons choisir, il ne s’agit plus de besoin, il s’agit d’envie, de désir. Des émotions similaires peuvent se retrouver chez nos 30 millions d’amis, mais c’est plus une dérive de leur confort qu’un sentiment inné. La personne qui nourrit le chat ou le chien se verra « câlinée » par celui-ci. Tandis que l’homme pourra vouloir partager son pain, même s’il en manque, avec son voisin. La notion de choix est donc essentiellement humaine. Et c’est là tout le problème : si nous n’avions satisfait que nos besoins, l’environnement ne serait pas dans un si sale état. La nature n’ayant plus la force de céder à tous nos désirs, nous sommes à un tournant de notre civilisation. A force de remettre la prise en compte du bien commun à demain, ce demain s’est transformé en aujourd’hui. La liberté de remettre certains engagements diminue donc de jour en jour. Mais nous restons ancrés sur notre libre arbitre, qui nous permet de faire passer d’abord notre intérêt avant celui de la communauté. J’exagère ? A peine : par chance la covid n’a pas été aussi létale que nous aurions pu le craindre. La décision de vacciner est donc restée un choix. Peu importe les arguments. C’eut été la peste, ce choix n’aurait pas pu être exercé de la même manière. Qui dit donc pesée d’intérêts dit choix, qui dit choix dit liberté. Quand il s’agira de la survie de l’espèce (eh oui, elle existe cette espèce), cette liberté s’effacera d’elle-même. Et je ne crois pas qu’un suicide soit un choix. Un choix entre la mort et la mort … Mais n’ayez crainte, il ne s’agira que de la disparition de l’espèce humaine. La Terre prendra tout son temps pour se reconstruire, elle …

La place du respect

Un autre trait propre à l’espèce humaine est son manque de respect pour autrui, pour l’autre. En se contentant de leurs besoins, les autres espèces pratiquent un respect induit. Nous, nous poussons jusqu’à l’absurde notre capacité à choisir, nous avons « consommé » à en faire pâlir la nature. Sans aucun respect quant aux limites de ces ressources, ni à leur juste répartition parmi nos semblables. Et, dans des dérives anthropocentriques, sans considération pour la différence. Différence de besoins, différence de comportement, différence d’émotivité. Mais voilà, nous avons déjà de la peine à respecter notre voisin, la minorité d’en face, la religion d’à côté, alors les règnes animaux et végétaux … Y aurait-il une autre manière de cohabiter avec des entités dont nous ne comprenons pas ni les besoins, ni les émotions ? Une larme de respect apporterait une certaine retenue dans notre « consommation » du vivant. Manger de la viande devrait être une manière de se procurer des protéines et non un statut social. Et cette retenue de se propager tout au long de la chaine. Elevage et abattage se doivent d’être le plus possible respectueux de besoins que nous ne comprenons pas forcément. Et il est aussi vain de pratiquer de l’anthropomorphisme à destination de la nature que de la reléguer au rang d’objet. Comme dit plus haut, l’éthologie a encore des progrès à faire.

Il est malgré tout utile de rappeler que cette attitude irrespectueuse prend sa source dans des événements douloureux de notre histoire. Jusqu’aux guerres de religion, la pratique religieuse apparaissait comme une possibilité de fraternité. Le nom de Dieu rassemblait. Ou plutôt le nom du Christ. Mais à la suite de ces boucheries, le christianisme n’est plus apparu comme étant épanouissant. Le commerce naissant (esclavagisme, colonialisme et plus tard économie libérale du siècle des lumières) a pris la place laissée vide par les idéaux chrétiens. Depuis, notre épanouissement passe par la possession, l’avoir. Et de transformer nos ressources naturelles en objets de consommation. Sacrés défis donc. Mais qu’est-ce donc qui bloque et notre prise de conscience et notre action ?

Nous n’en faisons pas assez

Cela vaut la peine de se pencher un peu plus sur les raisons de ces manquements. Notre tendance à privilégier nos préférences, d’abord. L’exemple des éoliennes vaudoises est parlant à ce sujet. Certains prêchent pour la protection du paysage, d’autre pour des énergies renouvelables, d’autre encore pour une nature et une faune intacte. Personne pour des énergies renouvelables ? Donc, à plusieurs, le conflit d’intérêt est inévitable. C’est fou ce que la possibilité d’un choix peut tout faire vaciller. Pour rappel, ce ne sont pas les paysages qui vont chauffer nos maisons en hiver, mais ce ne sont pas non plus les éoliennes qui vont faire venir les touristes et protéger la faune locale, la biodiversité. Comme toujours, la solution viendra d’une réelle pesée d’intérêts, objective et exhaustive. Par exemple en faisant peser les inconvénients sur les décideurs, leur faisant porter les conséquences du choix. A voir, car il sera très difficile de valoriser la perte de biodiversité à ceux qui auront choisi l’énergie.

Le débat sur notre droit à toucher au capital nature, lui, reste ouvert. C’est ce droit qui a été utilisé lors de la création de cités : asséchage de marais dits insalubres, bétonnage, gestion des eaux, modification des paysages … Personne ne remettra en cause l’existence de ces villes. Sauf peut-être quelques intégristes écolos … A leur intention le message suivant : l’énergie solaire est aussi une ressource finie, cette fin n’est seulement pas perceptible aujourd’hui. Comme l’était le pétrole à la fin du 19ème.

Ce qu’il faudrait inventer n’est pas tant le changement d’énergie, que le recyclage, au sens large. Les animaux défèquent, les arbres meurent, mais jamais rien n’est perdu. Il n’y a pas de poubelle dans la nature, elle est un cercle vertueux. Avec l’idée de ne produire que ce qui est « recyclable », en un mot ce qui peut, sous une forme ou une autre, resservir. Mais ce défi là, c’est une autre histoire.

C’est pourtant notre seul salut. J’insiste, le seul. Replanter des zones entières déforestées n’est pas garanti en termes d’efficacité. En effet, une espèce arboricole sexy aujourd’hui le sera peut-être beaucoup moins dans une centaine d’années. Et ça c’est demain. J’exagère ? Eh bien non, et pour le prouver je peux citer deux exemples : les arolles plantés en grand nombre dans le canton de Fribourg à la fin du XIXème siècle et le remplacement, dans les forêts domaniales de Fontainebleau, du chêne par le hêtre sous Louis XIV. A Fribourg, il reste aujourd’hui très peu d’arolles à des altitudes ou il est entré en concurrence avec l’épicéa. Quant à Fontainebleau, les chênes ont pratiquement disparu, n’ayant pas supporté la concurrence du hêtre. Cela ne veut pas dire que nous devons nous abstenir, cela signifie plutôt que nous devons continuer à douter, éviter les intégrismes de tout poil, promouvoir la prise de conscience. Et participer à l’amélioration de notre société. Vous savez, l’intérêt commun …

La société non plus

Quand des valeurs déjà profondément ancrées dans l’inconscient collectif ne sont pas respectées par l’état, alors il faut bouger. Des camions-bennes qui traversent toute la Suisse pour déverser leur contenu à l’autre bout du pays, c’est une dérive inacceptable. Des immeubles propriété de l’état qui ne sont pas isolés correctement, ce n’est pas normal[1], alors que les privés sont dans l’obligation de procéder à ces travaux. Le manque de moyens disponibles pour faciliter le tri de nos déchets est aussi insultant. Ce qui pose la question du contrôle. Je ne suis clairement pas pour un état omniprésent, mais je me demande à quoi servent nos lois, si elles ne sont pas respectées. Elles sont confiées à la bonne foi de nos concitoyens ? Je veux bien … Mais alors expliquez-moi pourquoi le contrôle des places de stationnement genevoises n’est pas, lui-aussi, confié à cette bonne foi ? La réponse est claire : cela rapporte de l’argent. C’est la négation même de la notion d’état. Egalité bafouée elle aussi : le citoyen mal parqué est puni alors que le jeteur inconscient ne le sera probablement jamais.

Corriger les mauvais fonctionnements de l’état, donc. Mais ce n’est pas tout. Il me semble que dans une situation d’urgence qui est la nôtre en ce moment, les dérives de la démocratie directe devraient être sanctionnées. Plus haut j’ai cité le problème des éoliennes vaudoises. Je pense que l’état à sa place pour raccourcir les délais et souligner les conflits d’intérêts inhérents à ces situations. Combien de projets j’ai vu passer, qui avaient gaillardement dépassé les délais et les budgets. Et pourquoi ? Pour satisfaire les intérêts de certains, cachés derrière des valeurs « morales » portées par des oppositions de principe. Et là encore je ne parle pas dans le vide : le CEVA a fait prendre de la valeur aux immeubles, alors que ce qui nous était promis par les antis, c’était le contraire. Personne ne fait jamais le point sur les arguments des uns et des autres. Il est vrai que cela n’intéresse personne. Mais cela ne nous oblige pas à avoir la mémoire courte.

Voilà pour les conflits d’intérêts. Dernier sujet sur lequel l’état pourrait avoir de l’influence, la prise de conscience. Aujourd’hui tout le monde est conscient de l’urgence ? Vous plaisantez, j’espère. L’ère Trump n’est pas si loin. Il y a donc une tranche non négligeable de la population qui ne réalise pas cette urgence. Et je ne peux pas leur en vouloir. Pendant des décennies on leur a prouvé par A+B que les déchets étaient sales, que la nature était une ennemie, que la supériorité de l’Homme était indiscutable. Et maintenant ils devraient jeter aux orties ces certitudes ? Et sans discuter ? Pas facile … C’est évident, il y a encore de l’espace pour la communication par l’état. Mais encore faut-il qu’il en ait le courage … Et qu’il prenne conscience que les décisions impopulaires le seront de plus en plus …

Incarnée, mais comment

En attendant, on fait quoi ? C’est un peu facile de critiquer les failles des systèmes humains ou autres. Mais quelle solution faut-il envisager ? Comment incarner le changement que nous voulons amorcer ? La piste à suivre pour une partie des réponses se trouve dans le chapitre « on en fait pas assez ». Ce sont les petits gestes que nous pouvons faire tous les jours qui vont, à la longue, porter leur fruit. Tri écolo, consommation en vrac, lectures d’étiquettes de consommation, diminution du gaspillage alimentaire, etc. Nous ne serons pas tous capables d’appliquer toutes ces mesures, mais au cumul, cela devrait faire l’affaire. C’est tout ? Non. Mais c’est par là qu’il faut commencer. Quelques chiffres à l’appui : aujourd’hui, mi 2022 à Genève, on n’a toujours pas atteint le seuil des 50% de déchets triés. Chaque genevois produit en moyenne 582 kg par an. Je vous laisse consulter le détail des chiffres des SIG, il laisse songeur. Les divas de l’écologie sont utiles pour la prise de conscience, en s’adressant aux autorités. Mais les gestes concrets qui vont sauver la planète, ceux-là nous appartiennent. C’est ça l’incarnation : vivre son témoignage. Il n’y a rien de moins constructif que de protester en permanence contre les injustices écologiques et ne rien faire, en pensant que ce sera de toute façon insuffisant.

Quelques références inspirantes

  • Les sœurs dominicaines de couvent de Taulignan. Elles produisent des herbes aromatiques bio, ayant créé un de ces fameux cercles vertueux. Je les ai d’ailleurs découvertes par un documentaire d’Arte : Le Ciel et la Terre.
  • Découvert dans ce même documentaire, Jean-Jacques Brun, Docteur en pédologie, auteur de plusieurs ouvrages incarnant l’écologie dans le christianisme
  • Fondation du maitre à penser de l’économie écologique, Bertrand Piccard, Solar Impulse nous propose des solutions pragmatiques aux défis environnementaux d’aujourd’hui. Un vrai remède à l’écoanxiété
  • Un monde connecté plus vert, c’est aussi possible. Une grande institution vous en parle



[1] Je suis probablement un nul de première, mais je n’ai pas trouvé de site officiel donnant des chiffres sur l’avancement des travaux de la ville de Genève. Mais il est intéressant de suivre les décisions du conseil municipal, qui discute encore en 2019 de budget a allouer à ces travaux … qui devraient être terminé depuis plus de 5 ans …

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Comme toute organisation humaine, cette église locale n’est pas exempte de défauts. Les « critiques » exprimées ici se veulent bienveillantes. Au bénéfice d’un vécu de plusieurs décennies au contact de cette institution, je l’ai vue parfois d’un peu trop près. Que ses responsables me pardonnent mon insolence, vous savez ce que l’on dit : qui aime bien châtie bien. D’ailleurs les paroissiens, dont je fais aussi partie, ne sont pas non plus absent des critiques que je me permets ici.

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